Le Conseil national du sida continue à suivre avec la plus grande attention les débats parlementaires concernant la réforme du code pénal. Il réprouve absolument l’adoption par le Sénat, en deuxième lecture, d’un amendement à l’article 222.18, qui entraîne la pénalisation de la dissémination d’une maladie transmissible épidémique en reprenant le texte d’un amendement similaire adopté en première lecture par le Sénat et rejeté ensuite par l’Assemblée nationale.

Le Conseil rappelle ci-après les raisons de son hostilité à la pénalisation de la dissémination involontaire, raisons qu’il avait fait connaître dans un avis rendu public le 25 juin 1991 :

« Pénaliser la transmission du sida serait une erreur dans le contexte du fonctionnement actuel de la société française, et ce pour les raisons suivantes :

  1. Ainsi que l’ont déjà souligné de nombreux commentateurs, la pénalisation de la transmission supposerait pour être applicable des investigations extrêmement poussées dans la vie privée des individus afin d’apporter des éléments de preuve. Le secret médical lui-même pourrait être mis à mal.
  2. D’autres articles du code pénal existent qui suffisent pour condamner au besoin des comportements criminels visant sciemment à nuire à autrui.
  3. Cette pénalisation fait reposer toute la responsabilité d’une relation sexuelle sur un seul des partenaires. Or tout rapport sexuel suppose une responsabilité partagée.
  4. En dissuadant tout un chacun de se préoccuper de son état sérologique et d’adopter une attitude responsable, la pénalisation irait à l’encontre de l’objectif mis en avant par les auteurs de l’amendement et ferait ainsi obstacle aux politiques de prévention.
  5. Dans ces conditions, la pénalisation n’aurait d’autre effet qu’une stigmatisation supplémentaire des personnes souffrantes, ce qui est contraire à la tradition de ce pays. »

L’amendement voté par le Sénat constitue par ailleurs un facteur d’exclusion et de discrimination à l’égard des séropositifs et des malades, ce qui est inadmissible sur un plan éthique. Le Conseil manifeste sur ce point précis sa solidarité avec les associations qui ont pris position contre cet amendement et attire vigoureusement l’attention des parlementaires et responsables politiques sur les risques de dérapage que l’adoption d’une telle mesure entraînerait.