La loi « relative à la maîtrise de l’immigration et aux conditions d’entrée, d’accueil et de séjour des étrangers en France » actuellement en discussion devant le Parlement est susceptible d’avoir des conséquences graves sur les personnes de nationalité étrangère qui risqueraient de ne plus pouvoir recevoir en France les soins que leur état de santé requiert.
Deux aspects de cette loi suscitent plus particulièrement l’inquiétude du Conseil national du sida.
L’impossibilité, désormais, pour toute personne en situation irrégulière, d’être affiliée à la sécurité sociale — et la désafiliation automatique de celles qui, à un moment donné, se retrouvent sans titre de séjour —, conjuguée avec la subordination de l’aide médicale à domicile, indispensable notamment pour l’achat de médicaments et les autres soins ambulatoires, à une condition de durée de résidence ininterrompue de trois ans sur le territoire français, va aboutir à priver de toute couverture sociale, et par là même de l’accès au système de soins, des personnes particulièrement vulnérables, tant sur le plan de l’insertion que de la santé.
Le nouveau texte, en rendant passibles d’expulsion, de reconduite à la frontière ou d’interdiction de territoire, des catégories d’étrangers qui jusqu’ici ne l’étaient pas, va aboutir à une augmentation du nombre des mesures d’éloignement du territoire. Ces mesures touchent souvent des personnes dont l’état de santé nécessite des soins lourds qu’elles recevaient en France, notamment dans les établissements pénitentiaires, et dont il est certain, compte tenu de la spécificité et du coût de ces traitements, qu’elles ne pourront bénéficier d’un équivalent dans les pays d’origine ou d’accueil où elles se trouvent renvoyées. Il s’agit notamment des personnes atteintes du sida, mais aussi d’autres pathologies graves. Le Conseil national du sida ne peut donc que renouveler, avec plus de force encore, la recommandation qu’il formulait dans son communiqué daté du 29 octobre 1991, dans lequel il demandait « que les autorités chargées de l’application de la loi portent une attention particulière au cas des personnes atteintes de pathologies graves et sursoient à l’application de l’expulsion dans tous les cas où, faute de moyens et d’infrastructures sanitaires adéquates, le malade ne pourra poursuivre son traitement médical dans les pays vers lesquels il se trouve renvoyé. Il s’agit ainsi d’éviter que l’expulsion n’entraîne des conséquences hors de proportion avec les faits qui sont à son origine ».
Note : Le texte législatif en cause a été adopté par le Parlement au cours de la session extraordinaire qui s’est achevée le 13 juillet. Il a fait l’objet d’un recours devant le Conseil constitutionnel qui l’a avalisé.