Lors de la séance plénière du 23 septembre 1991, le Conseil national du sida a pris à l’unanimité un avis relatif à la récente convention passée entre les pouvoirs publics et les assurances. Dans cet avis, il se montre réservé sur ce texte. Il déplore d’abord que les engagements pris en commun par MM. Evin et Bérégovoy en mars 1991 ne soient pas respectés. Les termes de la convention qui vient d’être signée lui inspirent de grandes inquiétudes.
La critique principale du Conseil porte sur l’avancée considérable prétendue que représenterait l’institution d’un contrat spécifique aux séropositifs. Cette avancée risque en effet de se révéler trompeuse, en raison de son champ extrêmement réduit (la couverture de prêts immobiliers d’un montant maximum d’un million de francs) et, surtout, de sa contrepartie : une liberté quasi totale concédée aux compagnies pour demander un test de dépistage, si cela leur paraît nécessaire. En l’état, le texte n’oppose plus aucun garde-fou du côté de la puissance publique. De même, le Conseil national du sida remarque que si les assureurs s’engagent à instituer un type très précis (et de fait très limité) d’assurance en faveur des séropositifs, cette liberté qui leur est accordée concerne a priori toute forme d’assurance personnelle (assurance d’un emprunt donc, mais aussi diverses formes d’assurances-vie, ce qui inclut les assurances de groupe et l’assurance-maladie complémentaire). On s’inscrit alors dans la situation de dérapage que le Conseil national du sida a souhaité et souhaite toujours éviter.
Dans l’avis qu’il a émis, le Conseil se montre critique également sur les questions qu’il est licite de poser et l’utilisation potentielle des réponses pour accepter ou refuser un contrat, ainsi que sur les modalités de préservation de la confidentialité.
La position du Conseil est plus sévère que celle des associations de défense des personnes malades ou séropositives. Cela est dû au fait que le Conseil a pour vocation de défendre sur le plan éthique les intérêts de toute la collectivité nationale, autant en ce qui concerne la santé publique que la protection des libertés individuelles, et non pas seulement les intérêts d’une catégorie particulière de personnes, serait-elle la principale victime de l’épidémie.