Depuis de nombreux mois, plusieurs procédures judiciaires, closes ou en cours, abordent la question de la transmission du VIH par voie sexuelle. Rapidement, la diversité des faits poursuivis – tromperie délibérée, dissimulation, transmission volontaire – a disparu du débat public au profit d’une controverse entre les associations de lutte contre le VIH, les plaignants et les associations de victimes. Si le droit individuel à réparation est une liberté fondamentale, pouvant conduire à une sanction légitime par l’intermédiaire de procès, son efficacité dans le cadre de la transmission sexuelle du VIH trouve des limitations plus importantes et pourrait même avoir un impact négatif en terme de santé publique. En effet, cela pourrait laisser croire que la répression pénale représente une protection efficace contre la contamination par le VIH. Par ailleurs, la stigmatisation pourrait être renforcée, rendant encore plus difficile la divulgation de son statut vis-à-vis de la contamination par le VIH.
Le CNS rappelle que la politique de prévention repose simultanément sur la responsabilité individuelle et sur le développement de la solidarité avec les personnes vivant avec le VIH. Il convient de réaffirmer que chacun, avec ses moyens, doit veiller à sa propre santé et à celle d’autrui, dans le souci du respect de l’autre. Si une personne vivant avec le VIH a la responsabilité de ne pas transmettre le virus, la personne non contaminée a la responsabilité, à l’occasion d’une nouvelle relation, de se protéger du VIH et des autres infections sexuellement transmissibles. L’idée généralement acceptée que le couple constitue une prévention objective et efficace, grâce à la fidélité, a montré ses limites, et ne protège pas en soi de l’infection à VIH. C’est pourquoi, pour celui ou celle qui a des relations sexuelles extra conjugales, l’exercice de la responsabilité consiste à se protéger lors de ces relations pour protéger le partenaire régulier. En cas de non-respect de ce contrat tacite par l’un des partenaires, l’autre perd toute possibilité de se protéger, sauf révélation par le premier d’une éventuelle contamination.
Il faut aussi souligner que la connaissance de son infection par le VIH n’implique en aucune manière de comprendre ou d’en accepter les conséquences. Dès lors, certains malades ne prennent pas toutes les précautions nécessaires pour protéger leurs partenaires ou à l’opposé, ils s’interdisent toute vie sexuelle, par peur de contaminer autrui. Au-delà de la sexualité, de nombreuses enquêtes démontrent clairement que la crainte justifiée d’être exclu (du travail, de la famille, de la communauté…), demeure encore prégnante. Face à cette stigmatisation et à ce rejet, la possibilité de dire son statut se restreint.
Dans certains cas de transmission, la responsabilité pénale d’une personne transmettant le VIH semble clairement engagée. Pour autant, il serait catastrophique que ces cas individuels conduisent à considérer que le seul fait de vivre avec le VIH fasse de la personne un criminel potentiel et renforce une stigmatisation existante. En dehors du domaine pénal, le CNS affirme le principe d’une double responsabilité : responsabilité des personnes contaminées de ne pas transmettre le VIH et responsabilité de toute personne de se protéger pour ne pas être contaminée.