Journée nationale de lutte contre les hépatites virales – 25 mai 2016

Depuis 2014, l’arrivée de nouveaux antiviraux d’action directe (NAAD) a profondément transformé la prise en charge thérapeutique de l’infection par le virus de l’hépatite C (VHC). Ces nouveaux traitements, hautement efficaces et bien tolérés, permettent aujourd’hui d’obtenir en quelques semaines la guérison virologique chez plus de 90% des patients.

Sur le plan de la santé individuelle, le bénéfice du traitement est démontré dans la prévention de la survenue de la maladie hépatique et de ses différentes complications, notamment les plus sévères (cirrhose, carcinome hépatocellulaire). D’un point de vue de santé publique, le traitement efficace de l’infection ouvre la perspective d’une forte réduction, voire d’une éradication de l’épidémie à VHC, en optimisant les stratégies de réduction des risques, de dépistage et de traitement précoces.

Le coût excessivement élevé des NAAD en France a cependant conduit les pouvoirs publics français à adopter jusqu’ici une politique de limitation de l’accès à ces traitements, en réservant leur prise en charge aux patients dont l’atteinte hépatique est la plus avancée.

Dans un courrier adressé en décembre 2015 aux ministres en charge respectivement de la santé ainsi que des finances et des comptes publics, le Conseil national du sida et des hépatites virales relevait que les critères d’autorisation de prise en charge financière des NAAD en vigueur étaient plus restrictifs que les recommandations thérapeutiques établies par les experts. Le Conseil faisait part de sa préoccupation face à une situation qui conduit à refuser la prise en charge du traitement à une partie des patients pourtant éligibles sur le plan de l’intérêt thérapeutique, et à différer leur accès jusqu’à aggravation de leur état de santé.

Cette situation perdure depuis de trop nombreux mois pour être considérée comme simplement transitoire. Concernant une pathologie fréquente, elle représente un cas sans précédent en France de restriction d’accès de certains patients à de nouveaux traitements plus efficaces, uniquement en raison de leur caractère onéreux. En l’absence de justification thérapeutique, le Conseil national du sida et des hépatites virales considère que cet accès différentiel constitue une discrimination entre patients qui n’est pas acceptable sur le plan éthique.

Ce décalage entre l’éligibilité thérapeutique et les conditions effectives d’accès s’aggrave aujourd’hui, puisque les dernières recommandations d’experts, plus larges que les précédentes, préconisent dorénavant que soit proposé un traitement antiviral à tous les patients infectés par le VHC.

Les limitations d’accès actuelles, au delà des pertes de chance qu’elles représentent pour les personnes concernées, sont contradictoires avec les politiques publiques de renforcement du dépistage du VHC. L’absence d’offre effective de traitement à l’issue du dépistage compromet son attractivité, à l’heure où le déploiement d’une offre de tests rapides d’orientation diagnostique (TROD) devrait favoriser le dépistage plus précoce d’un plus grand nombre de patients.

Pour ces raisons à la fois éthiques et de santé publique, le Conseil national du sida et des hépatites virales estime donc que de la politique de lutte contre le VHC en France doit dès à présent être redéfinie en fonction de l’objectif du dépistage et d’une offre de traitement antiviral à toutes les personnes infectées par le VHC. Certains pays européens ont au demeurant déjà fait ce choix et entrepris de déployer des stratégies adaptées.

L’affirmation de cette ambition exige la mobilisation des pouvoirs publics, s’agissant du prix des médicaments : le Président de la République a souligné « la détermination de la France à lutter contre le prix prohibitif de certains nouveaux médicaments, tout en promouvant l’innovation » et rappelé la nécessaire mobilisation des pays du G7 sur cet enjeu. (1) Il appartient donc aux pouvoirs publics de parvenir à la baisse significative des prix des NAAD dans le cadre de leur politique conventionnelle de fixation des prix avec l’industrie pharmaceutique et, au plan international, de contribuer à l’élaboration d’un nouveau cadre de régulation.

Plus largement, l’affirmation de cette ambition nécessite le concours de l’ensemble des acteurs impliqués s’agissant de l’organisation du système de soins : renforcer le dépistage et l’offre de traitement antiviral à toutes les personnes chez lesquelles l’infection par le VHC a été dépistée doit conduire, dans un contexte humain et financier contraint, à optimiser les ressources actuelles du système de soins et à innover notamment dans la répartition des tâches entre les professionnels de santé.

Le Conseil national du sida et des hépatites virales restera particulièrement attentif au cours des prochains mois à une juste adaptation des conditions de prise en charge des NAAD à l’évolution des indications thérapeutiques. Il contribuera, en tant que de besoin, à la réflexion sur les différents enjeux éthiques, de santé publique et de mise en œuvre opérationnelle soulevés par ces évolutions.

Contact :

- Julien Bressy, Chargé de communication

01 40 56 68 52 | 06 35 26 85 71 | julien.bressy@sante.gouv.fr

Note :
(1) François Hollande, “Towards a global agenda on health security”, The Lancet, 2 mai 2016